mercredi 25 février 2015

Une vocation

Tante Yo (1939)
Encre et aquarelle 
sur papier New Soho series (7" X10")

Je n'ai jamais vu les cheveux de tante Yolande car, étant religieuse, elle portait toujours le voile quand je la visitais. 

Peut-être est-ce la raison pour laquelle j'ai eu tant de difficulté à peindre sa belle chevelure si foncée, si épaisse? Peut-être est-ce tout simplement par manque de technique ou parce que je n'utilisais pas les bons pigments? Devrais-je me résigner à acheter un tube de noir pour des situations comme celle-ci?

J'ai écrit dans un billet précédent   que tante Yolande est entrée chez les Moniales Dominicaines de Berthierville en août 1939.  Deux ans plus tard, elle prononçait les vœux définitifs par lesquels elle devenait une sœur cloîtrée et vivrait une vie de contemplation pour le reste de ses jours.

Je n'ai jamais compris comment une jeune femme de 25 ans aussi cultivée, libre, bachelière en musique, possédant sa propre voiture (une rareté dans les années 1930) avait pu prendre une telle décision !

Quand j'étais petite, visiter ma tante au Monastère relevait un peu d'une grande expédition ! A l'époque, il n'y avait pas d'autoroute entre Québec et Berthierville et, par endroits, la route était en gravier ! Quand on arrivait au Monastère, une sœur portière nous accueillait et nous conduisait à la salle des visiteurs. Là, tante Yolande nous recevait derrière un double grillage.  

Tante Yo au Monastère
lavis, encre, graphite et crayons de couleur 
in Stillman & Birn-Zeta series sketchbook, 180lb 5.5" X 8.5"

Il était impossible de la prendre dans nos bras, de l'embrasser. 

Je ne comprenais pas pourquoi je ne pouvais pas toucher réellement ma tante si gentille et au si beau sourire. Heureusement, les petits doigts de ma sœur et moi se faufilaient aisément à travers les deux grilles pour lui toucher les mains. On aimait beaucoup ce petit jeu!

Plus tard, il n'y eu plus qu'une grille et puis, dans les dernières années, seulement un mur bas nous séparait. 

J'aimais aller au Monastère et écouter Tante Yolande jouer de l'orgue dans la belle chapelle toute blanche et aux si beaux vitraux. Et dans ces moments où la musique et la belle lumière m'entouraient, je pouvais enfin percevoir cette paix qui avait accompagnée ma tante dans sa vie de prière.

6 commentaires:

  1. What a lovely, lovely story. I enjoyed every word. Thank you. And your artwork, as usual, is simply wonderful!

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  2. Merci d'avoir partagé de cette belle histoire! Je t'envoie un gros bouquet de mimosa pour te réchauffer.

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    1. Merci, Petit Nuage, pour ton gentil commentaire et le beau bouquet de mimosa!
      En passant, le mimosa de Nice est arrivé à Montréal et coûte une petite fortune!.

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  3. J'aime beaucoup ton post Martine. L'histoire de ta tante me rappelle le Couvent des Carmélites à Trois-Rivières qui était voisin de mon Ecole Secondaire. Je me demandais toujours comment une personne pouvait vivre enfermée derrière ces murs sombres jour après jour. Vraiment, des vies de sacrifices!... Bonne fin de semaine ! :)

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    1. Merci Helen! Pour moi, la vocation, restera toujours un mystère. L'abnégation, une vie de prières... J'aurais dû poser des questions à ma tante mais...

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